Révolution verte : Les entreprises face au défi du reporting climatique

Dans un contexte d’urgence climatique, les entreprises se voient imposer de nouvelles obligations en matière de reporting environnemental. Cette évolution réglementaire transforme profondément les pratiques de gouvernance et de communication des sociétés.

Le cadre réglementaire du reporting climatique

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015 a marqué un tournant en imposant aux grandes entreprises françaises de publier des informations sur leur impact climatique. L’article 173 de cette loi oblige notamment les investisseurs institutionnels à communiquer sur la prise en compte des critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) dans leur politique d’investissement.

Au niveau européen, la directive sur le reporting extra-financier (NFRD) de 2014, révisée en 2019, impose aux grandes entreprises de publier des informations sur leurs politiques en matière d’environnement, de respect des droits de l’homme et de lutte contre la corruption. Cette directive est en cours de refonte pour devenir la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), qui élargira considérablement le champ des entreprises concernées et le niveau de détail des informations à fournir.

Les informations à communiquer

Les entreprises doivent désormais rendre compte de leur empreinte carbone, en détaillant leurs émissions directes (scope 1), indirectes liées à l’énergie (scope 2) et autres émissions indirectes (scope 3). Elles sont tenues de présenter leur stratégie bas-carbone, incluant des objectifs chiffrés de réduction des émissions à court, moyen et long terme.

La communication doit porter sur les risques climatiques auxquels l’entreprise est exposée, qu’ils soient physiques (impacts directs du changement climatique) ou de transition (liés à l’évolution vers une économie bas-carbone). Les entreprises doivent expliquer comment ces risques sont intégrés dans leur gouvernance et leur stratégie.

Les informations doivent inclure des indicateurs de performance (KPI) pertinents et comparables, ainsi que la méthodologie utilisée pour les calculer. La taxonomie européenne des activités durables, entrée en vigueur en 2022, fournit un cadre de référence pour évaluer la durabilité des activités économiques.

Les défis de la mise en œuvre

La collecte et l’analyse des données nécessaires au reporting climatique représentent un défi majeur pour les entreprises. Elles doivent mettre en place des systèmes d’information capables de tracer les émissions de gaz à effet de serre tout au long de leur chaîne de valeur, ce qui implique souvent une collaboration étroite avec leurs fournisseurs et clients.

La fiabilité et la comparabilité des données sont cruciales pour la crédibilité du reporting. Les entreprises doivent s’appuyer sur des méthodologies reconnues, telles que le GHG Protocol pour le calcul des émissions de gaz à effet de serre, et faire vérifier leurs informations par des tiers indépendants.

L’intégration du reporting climatique dans la stratégie globale de l’entreprise nécessite une implication forte de la direction générale et une coordination entre les différents services (finance, RSE, opérations, etc.). Cela peut conduire à une refonte des processus de décision et de gestion des risques.

Les opportunités du reporting climatique

Au-delà de la conformité réglementaire, le reporting climatique offre aux entreprises l’opportunité de repenser leur modèle économique pour l’adapter aux enjeux de la transition écologique. Il peut stimuler l’innovation et l’identification de nouvelles sources de création de valeur.

Une communication transparente sur les enjeux climatiques permet de renforcer la confiance des parties prenantes : investisseurs, clients, employés, régulateurs. Elle peut améliorer l’accès au financement, notamment via les obligations vertes ou les prêts liés à des objectifs de durabilité.

Le reporting climatique favorise également une meilleure gestion des risques en incitant les entreprises à anticiper les impacts du changement climatique sur leur activité. Il peut ainsi contribuer à renforcer leur résilience face aux défis environnementaux à venir.

Les perspectives d’évolution

La tendance est à une harmonisation internationale des standards de reporting climatique. L’initiative de la Fondation IFRS pour créer des normes mondiales de publication d’informations sur la durabilité (ISSB) vise à établir une base de référence globale.

L’intelligence artificielle et le big data ouvrent de nouvelles perspectives pour améliorer la collecte et l’analyse des données environnementales. Ces technologies pourraient permettre un reporting plus fréquent et plus précis, voire en temps réel.

À l’avenir, le reporting climatique pourrait s’étendre à d’autres enjeux environnementaux comme la biodiversité ou l’économie circulaire. La prise en compte de ces dimensions permettrait une évaluation plus complète de l’impact environnemental des entreprises.

Face à l’urgence climatique, le reporting environnemental s’impose comme un outil incontournable pour orienter l’économie vers un modèle plus durable. Les entreprises qui sauront transformer cette obligation en opportunité seront les mieux placées pour réussir leur transition écologique et répondre aux attentes croissantes de la société.